La consommation est une drogue dure

Il faudrait consommer pour combattre la morosité économique. C'est du moins ce qu'on nous répète. Est-ce vraiment là le remède miracle? Ou une façon d'entretenir notre paradis artificiel?

Lors d'un débat récent à la radio de Radio-Canada, le professeur de management de l'Université McGill, Louis Chauvin, faisait état de plusieurs études qui confirment la parenté entre les circuits neuronaux du plaisir activés au moment de la consommation de drogues dites "classiques" et ceux qui sont à l'oeuvre lorsque des consommateurs se lèvent à 3 heures, le matin du 26 décembre, pour économiser 20$ à l'achat d'un appareil photo numérique.

Voici à cet égard un petit extrait fort instructif tiré d'un numéro récent de la revue Psychologie politique: "La drogue [...) ne désigne pas une notion scientifique ou pharmacologique. Dans les faits, elle se réfère à une catégorie qui reflète la manière dont une société a décidé de traiter une substance."

La consommation comme paradis artificiel? Quand on se rend compte de tous les inconvénients (embouteillages, promiscuité, stress, mauvais alimentation, endettement et, finalement, possibilité de voir tout s'écrouler à plus ou moins long terme) que le consommateur supposé "rationnel" est prêt à endurer pour stimuler ses sircuits du plaisir, on peut se questionner. Or, récemment, l'ONU nous apprenait que 60% des écosystèmes dont dépendent les humains pour leur alimentation sont en atrophie ou en déclin prononcé. Le garde-manger se vide et notre gouvernement offre des crédits d'impôt pour inciter à rénover la maison...

Et que dire des publicitaires, ces experts qui huilent actuellement les engrenages ensablés du capitalisme malade pour nous inciter à consommer? Ils ont tout des apprentis sorciers qui jouent - sans le savoir, vraiment? - avec la dopamine, la sérotonine et autres neurotransmetteurs responsables du développement de certains comportements réflexes chez l'humain. Pourtant, au début des années 70, le Club de Rome appelait déjà à un arrêt de la croissance économique pour des raisons de survie.

Aujourd'hui, la civilisation serait-elle en danger de mort à cause de notre méconnaissance des impacts de la publicité sur les complexes mécanismes de récompense et de plaisir enfouis au plus profond de nos cerveaux? Notre planète est-elle en train d'imploser sous l'excès des comportements réflexes dont nous sommes les esclaves? Bref, à la merci d'une bande de drogués?

Ce grand déterminant de notre économie...