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Etats-Unis - Les foires aux armes dans le viseur

De notre envoyé spécial dans l’Ohio, Alexis Buisson, le lundi 30 novembre 2009 à 04:00

Alors que les ventes d’armes à feu explosent aux Etats-Unis, les centaines de foires aux armes organisées tous les mois sont accusées d’être les supermarchés du crime. L’une d’elle s’est tenue ce week-end, à Columbus dans l’Ohio. Reportage.

Lou-Anna avait l’embarras du choix pour gâter son beau-fils à l’approche des fêtes. De passage avec son mari à la foire aux armes de Columbus (Ohio), samedi dernier, cette Américaine, dans la soixantaine, aurait pu lui offrir une belle arme de poing et les munitions qui vont avec. Ou encore un taser, plus léger, et dont le « son vous met de bonne humeur dès le réveil », plaisante la vendeuse qui en fait la promotion. Ou même un livre pour enfant intitulé Mon premier fusil, disponible pour seulement 13 dollars à un autre stand. Mais comme son beau-fils a 33 ans et « adore chasser le cerf », elle a finalement jeté son dévolu sur un superbe fusil, qu’elle promène fièrement dans les allées de la foire.

La foire de Columbus fait partie des 5.000 foires aux armes qui prennent place chaque année aux Etats-Unis, selon l’ATF (Bureau of Alcohol, Tobacco, Firearms and Explosives). Elles draineraient entre 12,5 et 25 millions d’Américains chaque année. A Columbus, plus de 4.000 personnes étaient attendues le week-end dernier au hall d’exposition, en plein centre-ville. « C’est un peu moins de personnes que l’an dernier, précise Steven Elliott, le patron de Showmasters, organisateur de multiples foires à travers le pays. Mais nous attendons malgré tout une foule importante. »

M. Elliott a toutes les raisons d’être confiant. Pour lui comme pour le reste des professionnels américains des armes à feu, l’année 2009 a été « exceptionnelle ». L’improbable raison de leur bonheur ? Barack Obama, dont l’élection en novembre 2008, comme celle de Bill Clinton en 1993, a incité des milliers d’Américains, redoutant des restrictions, à faire le plein d’armes. 13,5 millions d’armes à feu devraient être vendues cette année, selon le FBI, contre 12,7 millions en 2008.

« Zones de non-droit »
Pourtant, même si les foires ne désemplissent pas, le bonheur n’est pas total. Depuis le début de l’année, le camp « pro-contrôle » qui milite pour des restrictions à l’achat d’armes est en guerre ouverte avec ces salons, qu’il accuse d’être de véritables « centres commerciaux pour criminels ». Un récent rapport du Brady Center, le plus grand lobby « pro-contrôle » du pays, les compare à des « zones de non-droit », dans lesquelles des délinquants peuvent acquérir des armes auprès de vendeurs amateurs qui ne sont pas soumis aux obligations de vérification d’identité imposées aux professionnels.

Les conséquences de ce vide juridique peuvent être dramatiques : selon l’ATF, les tueurs responsables du massacre de Columbine en avril 1999 (13 morts et 23 blessés) auraient utilisé des armes achetées auprès de particuliers dans des foires similaires à celle de Columbus.

« 97 % des vendeurs sont propres »
Dans l’Ohio, où une arme peut être portée en évidence à la ceinture où dans la poche, on fustige cette « attaque » contre le deuxième amendement de la Constitution, qui garantit à chaque Américain le droit de posséder une arme.
« Notre Constitution nous permet d’avoir des armes à feu et le Gun Control Act de 1968 d’en vendre. Cela signifie qu’un particulier a le droit de vendre ses armes s’il le souhaite », indique Steven Elliott, dont l’un des salons a récemment fait l’objet d’une visite du FBI. Les fédéraux soupçonnaient que des armes illégales trouvées à New York y aient été achetées.

« Aucun vendeur ne veut avoir son nom associé à une tuerie, souligne pour sa part Dale Borts, vendeur d’armes professionnel à Dayton (Ohio) depuis dix-huit ans. Le mieux que l’on puisse faire en tant que professionnels, c’est de vérifier le casier judiciaire et l’identité de l’acheteur, et de garder une trace écrite de la transaction. Après cela, j’aurai au moins la certitude d’avoir vendu une arme à quelqu’un qui n’est pas un criminel […] 97 % des vendeurs d’armes sont propres. »

Samedi, dans les allées de la foire, des vendeurs amateurs pouvaient être aperçus, entre les étals, une arme à l’épaule, et un descriptif de l’arme en question à l’attention de clients potentiels collé sur leur manteau. De toute évidence, ces transactions échappent a toute forme de vérification. Une situation qui ne dérange pas Steven Elliott : « Si le vendeur a une licence professionnelle, il doit soumettre l’acheteur à un contrôle d’identité. S’il n’a pas de licence, je fais confiance au vendeur pour qu’il pose les bonnes questions, » avance-t-il. Insuffisant, pour l’heure : aux Etats-Unis, les armes à feu tuent 30.000 personnes en moyenne chaque année.

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“Le contrôle des armes profitera aux mauvaises personnes”
Rencontré au détour des étals de Colombus, Rick, acheteur fidèle des foires d’armes, explique pourquoi il ne faut surtout pas limiter le port des armes aux Etats-Unis.

FRANCE-SOIR. Pourquoi êtes-vous contre le contrôle des armes à feu, alors que 30.000 personnes meurent chaque année des suites d’une attaque par balles ?
?RICK. Le deuxième amendement de la Constitution nous donne des droits, il faut en profiter et les protéger. Le contrôle des armes profitera aux mauvaises personnes : ceux qui achèteront leurs armes légalement seront lésés tandis qu’il sera toujours aussi facile pour les autres de se les procurer.

Etre armé vous paraît-il nécessaire ??
Ça me sert à protéger ma famille et ma propriété. Si quelqu’un entre dans ma maison sans y être invité, il sait à quoi s’attendre : il sera abattu. Je prie chaque jour de ne jamais avoir à le faire. Pour l’instant, je me contente de tirer sur des cibles de papier (rire).

Craignez-vous que Barack Obama n’impose de nouvelles restrictions sur l’achat et le port d’armes à feu ??
Il y aura toujours des « gauchistes » qui auront peur des armes. Je pense que le gouvernement va essayer de renforcer son contrôle sur les armes à feu en limitant les munitions. On s’apercevra des conséquences d’une telle mesure lorsque, dans trente ans, une révolution éclatera et que personne ne pourra se défendre.