Les promesses de l’industrie du cannabis

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Les plants de cannabis ne grimpent pas jusqu’au ciel. Quoique. Depuis le 1er janvier et la légalisation de la marijuana au Colorado, les actions des sociétés liées à cette nouvelle industrie semblent être capables de défier les lois de la nature. Certaines ont ainsi gagné près de 2000% (voir ci-dessous ).

«Le cannabis légal est l’industrie qui possède aujourd’hui la croissance la plus rapide aux Etats-Unis», affirme Steve DeAngelo, président d’Arc View. Ce groupe californien joue les entremetteurs entre les investisseurs prêts à miser leur argent et les entrepreneurs dont les tiroirs débordent de nouvelles idées. Arc View produit par ailleurs une étude sur cette industrie (au prix de 475 dollars pour quelque 240 pages), pour l’heure cantonnée au marché américain. «En 2014, le marché national devrait croître de 64% pour atteindre 2,34 milliards de dollars. D’ici à cinq ans, il touchera les 10,2 milliards de dollars; une augmentation de 700%», se réjouit Steve DeAngelo au téléphone, depuis son bureau de Californie.

«Tout le monde est en train de chercher comment grimper dans le train», résume Thomas Veillet, conseiller genevois en investissements chez Investir.ch, qui s’est penché sur la question. Mais attention aux coquilles vides. Comme le montrent les exemples ci-dessous, «beaucoup de sociétés liées au cannabis ne sont pas encore prêtes à passer le cap d’une entrée en bourse», reprend Steve DeAngelo. Sa propre entreprise, Harborside Health Center, se présente comme le premier distributeur de cannabis légal au monde (31 millions de dollars de chiffre d’affaires par an). Une entrée en bourse n’est pas à l’ordre du jour.

Car, si le Colorado est le premier Etat américain à légaliser la commercialisation et la consommation de cannabis récréatif pour les plus de 21 ans, d’autres Etats – qui tolèrent pour l’heure uniquement la consommation médicinale – ont prévu de suivre. A Washington, la légalisation est attendue pour 2014. En Californie, au Nevada et en Arizona (et dans onze autres Etats), des aménagements de la loi sont prévus d’ici à 2019.

Un «point de basculement», selon Steve DeAngelo, a été atteint fin janvier. A Washington, le ministre de la Justice, Eric Holder, a annoncé que le Trésor allait permettre aux banques américaines d’ouvrir leurs coffres aux commerces de marijuana. Jusque-là, sans accès au secteur bancaire, les «Coffee-shops» se plaignaient de devoir réaliser toutes leurs opérations financières (salaires, loyers, etc.) en liquide.

La tendance outrepasse le seul territoire américain. L’Uruguay a fait office de pionnier de la légalisation en décembre 2013. L’Espagne a rouvert le dossier. En Suisse, pas un mois ne se passe sans que différents petits pas soient réalisés en direction d’une dépénalisation. En décembre, des députés genevois ont proposé d’ouvrir des «cannabis social clubs» à Genève; des associations visant à encadrer la consommation de marijuana. En janvier, la Commission fédérale pour les questions liées aux drogues annonçait vouloir relancer le débat sur la dépénalisation. Cela permettrait «aux 500?000 consommateurs suisses de cannabis d’éviter le marché noir», défend André Fürst. Pour l’heure, explique ce cultivateur professionnel et animateur du site Chanvre-info.ch, les Suisses se fournissent grâce à «quelque 1000 sites de production illégaux existant à travers le pays».

L’avenir de la consommation de cannabis ne passera toutefois pas par les joints roulés à l’ancienne, prédit Steve DeAngelo: «Ingestion, e-cigarette contenant du THC [principe actif du cannabis], capsules, etc. La fleur va rester en retrait.» Ce jour-là, juge Thomas Veillet, «British American Tobacco et Philipp Morris seront au premier rang pour saisir les opportunités».

En attendant, les médias américains s’enthousiasment pour ce nouveau marché: «Les spéculateurs voient vert», «Ils allument une nouvelle industrie», «Le terrain est fertile pour les investisseurs», «Faites tourner les actions», etc. La marijuana légale stimule déjà l’inventivité des commentateurs.

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