À quelques mois de la légalisation fédérale du cannabis, la police perd encore son temps à arrêter des gens pour quelques grammes.

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Voici ce qui se passe si on se fait arrêter pour possession de cannabis

Billy Eff

avr. 17 2018, 2:14pm
À quelques mois de la légalisation fédérale du cannabis, la police perd encore son temps à arrêter des gens pour quelques grammes.

Ça fait déjà un moment que la légalisation du cannabis est attendue au Canada. Aux dernières nouvelles, ce devrait être avant la fin septembre. D’ici là, par contre, l’interdiction de possession est toujours en vigueur et elle peut être appliquée par les policiers. Mais, à quelques mois de la légalisation, est-ce que les policiers prennent encore le temps d’arrêter les gens pour possession simple? Et comment s’y prennent les avocats dans un tel dossier? Tenteront-ils simplement de retarder le procès jusqu’à la légalisation?

En 2016 — plus récente année pour laquelle Statistique Canada a publié des données —, 44 301 personnes se sont fait arrêter pour possession de cannabis au Canada. De ce nombre, 40 % ont été inculpées, mais on ne sait pas précisément combien ne se sont fait arrêter que pour possession simple, sans avoir été accusées d’autres infractions criminelles.

Lorsque je demande à Anthony El-Haddad, avocat en droit criminel et pénal, comment il traiterait le dossier d’un client accusé de possession simple dans le contexte actuel, il me confie qu’il en a reçu deux depuis le début de la semaine. « Ça arrive encore assez régulièrement, me dit-il. C’est encore illégal, mais les sentences sont clémentes, donc en général on négocie une absolution pour nos clients. » Une absolution signifie que l’accusé n’aura pas de dossier criminel malgré les accusations. On le condamne plutôt à faire du travail communautaire ou un don à un organisme de bienfaisance, par exemple. Dans tous les cas, la personne devra se présenter devant la cour. Certaines conditions peuvent toutefois aggraver les choses. « Lorsque les policiers trouvent du cannabis dans un véhicule, les procureurs peuvent encore être sévères. » Il m’explique aussi que, si l’accusation est déposée avant la date officielle de légalisation, tenter de repousser l’audience jusqu’à cette date ne servira pas à grand-chose.

Quant à l’amnistie pour les cas antérieurs de possession simple, le premier ministre Trudeau dit que son gouvernement compte attendre la légalisation avant de se pencher sur le dossier. « Nous savons que la loi actuelle nuit aux Canadiens et criminalise des Canadiens qui ne devraient peut-être pas l'être. Mais c'est un engagement que nous prendrons une fois que nous aurons mis en place un régime légalisé et contrôlé, pas avant », a affirmé aux médias Justin Trudeau en janvier 2017. Depuis, un conseiller du ministre fédéral de la Santé, Scott Bardsdale, a pour sa part confié à La Presse qu’« à mesure que le cadre législatif pour la légalisation du cannabis progresse, le gouvernement a l'intention d'envisager des options sur ce qui peut être fait pour rendre la situation plus juste pour les Canadiens qui ont déjà été condamnés pour la possession de petites quantités ».

Dans la plupart des provinces, les arrestations pour possession simple sont de moins en moins communes, mais elles n’ont pas pour autant cessé. Breeze* a été arrêté en mai 2017. Alors qu’il conduisait sur une artère majeure de l’Ouest-de-l'Île, il a eu un problème avec la transmission de sa voiture et a été obligé de s’arrêter en plein milieu de la rue. Une voiture s’est garée derrière la sienne et un homme est venu l’aider. En entrant dans le véhicule, l’homme s’est aperçu qu’il y avait une odeur de cannabis. C’est alors qu’il a montré à Breeze son badge avant d’inspecter la voiture et d’y trouver 20 grammes de weed. Après avoir plaidé coupable sur la recommandation de son avocat, Breeze s’est vu contraint de faire un don de 220 $ à une œuvre de bienfaisance de son choix.

Quelques mois plus tard, il s’est de nouveau fait arrêter, alors qu’il était interpellé par la police au centre-ville de Montréal, sous prétexte qu’il « correspondait à une description ». Les agents l’ont fouillé et ont trouvé cinq grammes sur lui. Il a dû promettre de comparaître en cour, où un juge lui a imposé une amende de 150 $, cette fois-ci payée directement à la cour.

Depuis, il dit se faire régulièrement interpeller par la police lorsqu’il conduit. Il lui est arrivé quelques fois d’avoir de petites quantités de cannabis sur lui, mais la plupart des policiers le laissent tranquille ou lui ordonnent de les jeter.

De son côté, Adam s’est fait attraper alors qu’il vendait du weed au cégep. La police affirme avoir été alertée par des témoins. Après son arrestation, Adam a été expulsé. « Lorsqu’ils m’ont arrêté, j’avais une balance et plusieurs baggies de weed, qui totalisaient 30 grammes. Le maximum toléré pour possession simple est de 28 grammes. Mais je leur ai fait remarquer qu’ils avaient pesé le tout avec les sachets de plastique, ce qui fait augmenter le poids. Ils ont donc écrit sur le constat que j’avais “entre 20 et 30 grammes”. »

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Sa première audience a été reportée faute de preuves. À la deuxième convocation, l’avocat d’Adam a plaidé que, comme les policiers ne l’avaient pas vu en train de vendre le cannabis, son arrestation était illégale. Adam a été acquitté et n’a pas de dossier.

Donc, oui, on peut encore se faire accuser de possession de weed. Et n’essayez pas de jouer la carte « mais ce sera bientôt légal! » si vous vous faites prendre — bientôt, ce n’est pas tout de suite. Ceux qui sont reconnus coupables peuvent s’attendre à payer une amende ou à faire des travaux communautaires. Les pénalités augmentent quand on n’en est pas à sa première infraction.

Billy Eff est sur internet ici et là.

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