Un café-resto pour les fumeurs de pot de la capitale?

Le Soleil, lundi 8 septembre 2003, p. A5
Néron, Jean-François

Le Bloc Pot (BP) sème présentement les graines qui permettront d'ici 2005, souhaite-t-il, d'ouvrir à Québec un café-restaurant pour les fumeurs de marijuana et un Club compassion. Contrairement à celui de Montréal, le projet d'ouverture à Québec d'un café-restaurant de type «apportez votre joint» est encore embryonnaire, estime le chef du BP, Hugô St-Onge. Principal obstacle, le Bloc éprouve de la difficulté à recruter des membres pour mener le projet à «maturité».

«Il n'y a actuellement qu'une seule personne responsable du BP dans la région de Québec alors que nous étions 15 personnes pour travailler au projet du café-restaurant à Montréal», explique le chef de parti.

Ce troquet, qui ouvrira à la fin septembre rue Saint-Denis dans le Quartier Latin, permettra la consommation de marijuana, sans toutefois en autoriser la vente.

Le BP profite ainsi d'un flou juridique, qui touche la possession simple de cannabis. En mai, la Cour supérieure de l'Ontario rendait inconstitutionnel et inapplicable un article de la loi, portant sur la possession simple. Depuis, les tribunaux supérieurs du Nouveau-Brunswick et de l'Île-du-Prince-Édouard ont appuyé cette décision. Résultat, les policiers de ces provinces ne portent plus d'accusation contre les personnes prises avec 30 grammes ou moins dans l'attente d'une décision de la Cour suprême, qui invaliderait les précédents jugements.

Le BP parle également depuis plus d'un an de l'implantation dans la capitale d'un Club Compassion, qui a pour mission de distribuer de la marijuana à des malades pour soulager leurs souffrances et leurs symptômes. Celui de Montréal existe depuis 1999. «Encore une fois, c'est le peu d'effectifs qui nous empêche d'ouvrir un club à Québec», renchérit M. St-Onge, qui affirme en contrepartie que la volonté y est.

Sortir du placard

Le BP recherche une chose: mettre un terme à la prohibition du cannabis. Mais pour y parvenir, croit M. St-Onge, les consommateurs devront, à l'image des homosexuels, s'identifier comme fumeurs de cannabis. «Les gens doivent sortir du placard. C'est peut-être plus difficile pour le professionnel ou la personne avantageusement bien connue dans son milieu, mais c'est le seul moyen d'effectuer les pressions politiques, qui permettront l'abolition de la prohibition.» À ce propos, M. St-Onge espère que le café montréalais servira d'espace politique à cette fin.

Au chapitre juridique, il prépare sa lutte contre les contraventions, qui seront émises aux personnes prises avec 15 grammes ou moins comme le prévoit le projet de loi déposé au printemps par le ministre fédéral de la Justice, Martin Cauchon.

Le responsable du BP de la région de Québec, Benjamin Kasapoglu, candidat du BP dans Taschereau aux dernières élections provinciales, est plus optimiste que son chef. Il croit possible l'ouverture d'un café-restaurant d'ici la fin 2004. «Je crois que Québec mérite d'avoir les mêmes services que Montréal et nous travaillons pour atteindre cet objectif.»

Comme dans la métropole, il envisage l'ouverture d'un café où la vente serait interdite, mais où les gens emmèneraient avec eux leur «stock». Les clients pourraient se procurer sur place du papier à rouler, des graines de cannabis, et bien sûr, sandwich et rafraîchissement.