Les politiques actuelles sur les drogues – 5. Conclusion

C'est ainsi que les politiques des institutions de la Justice et de la Santé prennent des axes de plus en plus contradictoires au fur et à mesure que l'approche de réduction des méfaits gagne du terrain. Plusieurs intervenants dans le secteur ont tenté et tentent encore d'éviter les débats que soulève cette situation.

Mais ces débats deviennent de plus en plus inévitables au fur et à mesure que l'on tente de traduire dans les politiques de santé publique l'approche de réduction des méfaits et ce, particulièrement à l'échelle nationale et internationale. L'OMS par sa recommandation de l'adoption de l'approche de réduction des méfaits a traduit au plus haut niveau la contradiction des politiques Justice-Santé puisque les Conventions internationales régissant la prohibition des drogues demeurent inchangées, maintenant les règles du jeu de la prohibition. Pas étonnant que des groupes internationaux cherchent de plus en plus à modifier ces Conventions.

De même, au début de la décennie, à l'instigation des villes d'Amsterdam, Hambourg, Francfort et Zurich, est créée une coalition, l’European Cities on Drug Policy (ECPD), et signée la Résolution de Francfort, préconisant une modification des politiques actuelles pour permettre une transition vers des politiques de réduction des méfaits; en l993, à sa réunion annuelle, le regroupement réunit des représentants de 58 villes, réparties dans 14 pays; la même année est inauguré à Baltimore (Etats-Unis) l’International Network of Cities on Drug Policy, qui mettra de l'avant une résolution similaire à celle de Francfort.

Enfin, les regroupements d'usagers de drogues se multiplient, et ce, même à l'échelle internationale, (ce qui est facilité, entre autres, par l'Internet) afin de revendiquer des changements aux lois, de même qu'appuyer et enrichir les pratiques de réduction des méfaits. Quant au Canada, en ce moment même, le Comité permanent de la santé du gouvernement fédéral essaie de reconnaître l'approche de réduction des méfaits en évitant de remettre en question les récents changements juridiques; le service correctionnel multiplie les tests de drogues et punit ceux qui testent positifs en même temps qu'il fournit de l'eau de javel et du désinfectant aux détenus pour qu'ils puissent nettoyer leurs seringues; il y a même un débat pour instaurer des programmes d'échanges de seringues en prison comme cela se pratique déjà dans d'autres pays; des centres de distribution de cannabis à des fins thérapeutiques sont tolérés par la police en Ontario même si la loi n'autorise pas ces pratiques, etc., etc. Les pratiques contradictoires s'empilent de manière de plus en plus visibles.

Comment résumer les débats sur les politiques actuelles en matière de drogues? L'empereur est nu. De plus en plus de gens s'en rendent compte. C'est bien embêtant pour tous les acteurs politiques, économiques et sociaux qui tirent profit de la guerre à la drogue. Mais moi cela me fait plaisir de le répéter : « L'empereur est nu! L'empereur est nu! L'empereur est nu! »