Les mesures d'éradication et l'échec du développement alternatif

L’idée de réduction de l’offre de stupéfiants à la source, par l'éradication des cultures illicites, apparue dans le Protocole de New York de 1953, a été reprise dans la Convention unique sur les stupéfiants de 1961:

La Partie qui interdit la culture du pavot à opium ou de la plante de cannabis prendra les mesures appropriées pour saisir les plants cultivés illicitement et pour les détruire, sauf pour de petites quantités nécessaires pour la Partie aux fins de recherches scientifiques. [1]

Une guerre contre l'agriculture

Le pilier principal de la « Guerre contre certaines drogues » est aussi une guerre contre l'agriculture traditionnelle et les agriculteurs des pays en voie de développement. On pourrait même parler d'un véritable écocide puisque, sur le terrain, les mesures d'éradication se sont parfois traduites par des épandages aériens de produits défoliants tels que le paraquat ou le glyphosate (herbicide de marque Roundup Ultra de la firme Monsanto), au détriment de l'environnement ainsi que de la santé des populations.

Au Québec, les mesures d'éradication comme l'Opération Cisaille sont heureusement limitées à l'arrachage manuel des plants.

Parfois qualifiée de « Convention inique », [2] la version initiale de 1961 ne prévoyait aucune mesure d’indemnisation ou de reconversion des cultures afin de venir en aide aux paysans privés de leur gagne-pain.

En 1972, la Convention unique a été amendée par le Protocole de Genève, qui en a accentué la rigueur. Le Protocole a cette fois prévu une aide financière aux pays dans lesquels l’application de la Convention pose problème. L’idée de développement alternatif, pour lequel a été créé le Fonds des Nations unies pour la lutte contre l’abus de drogues (FNULAD) en 1971, a donc commencé à faire son chemin.

Malheureusement, 35 ans plus tard, il apparaît évident que le développement alternatif n'a jamais vraiment pris son envol, car les sommes qui y ont été allouées ont toujours été absolument dérisoires par rapport aux sommes allouées à l'éradication ou aux interventions policères et militaires de toutes sortes. Les problèmes vécus en Colombie et en Afghanistan depuis 2000-2001 en témoignent.


[1] Convention unique sur les stupéfiants de 1961 telle que modifiée par le Protocole du 25 mars 1972 portant amendement de la Convention unique sur les stupéfiants de 1961, 8 août 1975, 976 R.T.N.U. 105, art. 22.2.
[2] Francis Caballero, Droit de la Drogue, Paris : Dalloz, 1989, p. 52.