Le cannabis à l’Âge classique et au Siècle des Lumières

C’est au XVIe siècle que l’Occident va véritablement (re)découvrir le cannabis. Au XVIIe siècle, il est essentiellement utilisé pour fabriquer voiles et cordages pour la marine et cultivé dans cette perspective en Amérique latine par les Espagnols et les Portugais. Il est ainsi attesté au Chili dès 1619. Le développement du commerce triangulaire aux XVIIe et XVIIIe siècles favorisera l’importation du cannabis africain en Amérique latine et notamment au Brésil.

La production européenne est de plusieurs dizaines de milliers de tonnes chaque année. Le refus de cultiver du chanvre est soumis au règlement d’une taxe importante dans l’Angleterre d’Elizabeth 1re (1533-1603). Les étrangers acceptant d’en cultiver obtiennent immédiatement le bénéfice de la nationalité anglaise. La situation est identique en Amérique du Nord: le refus de produire du chanvre est considéré comme passible d’une peine de prison en Virginie au XVIIIe siècle! Dans la France de cette époque, le chanvre est aussi considéré comme une production agricole de premier ordre; son usage thérapeutique demeure cependant encore une curiosité. Le produit est si précieux qu’un décret de 1802 interdit son exportation vers l’Allemagne et la Suisse. Et Napoléon déclara la guerre à la Russie en partie pour l’empêcher de fournir du chanvre aux Anglais. La flotte anglaise était alors dépendante des fibres importées de Russie, l’Empereur imaginait mettre un terme au blocus maritime imposé par l’Angleterre.

Le taxinomiste suédois Carl von Linné (1707-1778), décrivant le cannabis en 1753, lui donne son nom scientifique actuel : Cannabis sativa. Il ne reconnaît qu’une seule espèce de plante. Jean-Baptiste de Monet, chevalier de Lamarck (1744-1829), quant à lui, le mentionnera dans sa grande Encyclopédie botanique (aux environs de 1783) et décrit ce qu’il estime alors être une autre espèce : Cannabis indica, le chanvre « indien ».