Histoire du chanvre au Canada – 1993-2001 : Des années d'espoir et d'efforts

En 1993, les résidents de Vancouver ont tenu le premier smoke-in dans cette ville depuis 1971. Plus de 3000 personnes se sont réunies à la Galerie d'art de Vancouver et ont marché jusqu'à l'Hôtel de ville pour protester contre le manque de justice de la loi canadienne sur les stupéfiants. Des organisations populaires ont vu le jour partout en Amérique du Nord, demandant que la législation sur les drogues soit changée. Les gens commencent à se rendre compte des coûts exorbitants de la soit-disant guerre contre la drogue. Le gaspillage de ressources économiques, les conflits sociaux et l'oppression gouvernementale résultant de cette situation sont devenus de plus en plus apparents à mesure que nos gouvernements adoptent des attitudes extrêmes pour empêcher l'utilisation du cannabis et d'autres herbes et intoxicants.

Le gouvernement de Brian Mulroney introduisit en 1992 un le projet de loi C-85, qui aurait doublé les pénalités pour la possession de marijuana, en plus d'agrandir la liste des substances interdites. Le projet de loi n'a pas passé en raison de la défaite électorale des conservateurs. Le nouveau gouvernement libéral présenta alors le projet de loi C-7 devenu plus tard projet de loi C-8, très semblable au projet conservateur. La nouvelle Loi réglementant certaines drogues et autres substances (chapitre C-38.8) est finalement entrée en vigueur le 14 mai 1997, après que le Sénat y ait apporté quelques changements mineurs. Cette loi vient remplacer l'ancienne Loi sur les stupéfiants ainsi que certaines parties de la Loi sur les aliments et drogues.

Les consultations que firent les sénateurs auprès de nombreux organismes demandant une révision en profondeur du projet de loi C-8 n'ont été faites que pour la forme. Résultat : la nouvelle loi bafoue les droits les plus fondamentaux des citoyens de ce pays, notamment en augmentant (encore) les pouvoirs de fouille et de saisie des policiers, et en utilisant de subtiles manoeuvres de manière à ce que plus de gens se retrouvent en prison plus rapidement. À titre d'exemple, le Barreau canadien, le Barreau du Québec, l'Association canadienne des avocats en matière criminelle, et l'Association médicale canadienne sont quelques uns des nombreux organismes à s'être opposés (en vain) à son adoption.

Une lueur d'espoir cependant : depuis mars 1998, le chanvre industriel (hemp) est légal, et a maintenant de beaux jours devant lui. Partout au pays, des entreprises dédiées au chanvre se sont installées, ont prospéré, et ont parfois été fermées pour avoir contrevenu à la loi. Ces boutiques qui vendent pipes, graines et bongs, ainsi que des vêtements, tissus, savons, bijoux à base de chanvre ou d'huile de chanvre sont le reflet d'une industrie en plein essor, tant en Europe que de ce côté-ci de l'Atlantique. Et ce n'est pas tout: elles sont l'exemple le plus probant d'un mode de vie respectueux de l'environnement.

Malheureusement, le cannabis dans son ensemble demeure une plante très contrôlée, devant être cultivée sur des fermes dans des conditions très strictes. Et bien que le débat sur la marijuana médicale ait repris de plus belle en 1997-98, nous sommes loin du jour où chacun pourra faire pousser le cannabis dans sa cour, pour en faire l'usage que bon lui semble : le manger, le fumer, le transformer en produits d'utilité courante. Nous croyons que l'accessibilité de cette ressource à l'ensemble de la population est primordiale.

On peut dire que les mouvements d'opposition à la prohibition se sont réellement structurés depuis le début des années 90. Le Canada, et plus précisément les provinces de Québec et de Colombie-Britannique, sont devenus des chefs de file dans ce secteur. Au Québec, le Bloc Pot fut le tout premier parti politique à avoir eu pour revendication principale la légalisation du cannabis. Le Parti marijuana, créé dans le sillon du Bloc Pot, a récolté un score impressionnant de 66 000 voix aux élections générales fédérales de novembre 2000. Par la suite, de nombreux partis provinciaux ont essaimé d'une mer à l'autre.

Tout cet activisme a bien entendu influencé le gouvernement libéral à Ottawa, qui a mis sur pied le Comité spécial sur les drogues illicites au Sénat, et a promis à maintes reprises de légiférer pour décriminaliser la possession de marijuana.