Légalisation du cannabis : le courage d’abandonner la lâcheté

Pour faire cesser cette guerre absurde et son cortège de drames et de vexations, une solution existe, c’est celle de la légalisation du cannabis.

Tribune
Légalisation du cannabis : le courage d’abandonner la lâcheté
Par Vincent Delhomme, directeur des études du think-tank GenerationLibre — 10 septembre 2020 à 19:34

La mise en place, depuis le 1er septembre, de l'amende forfaitaire pour usage de stupéfiants relève d'une politique répressive d'un autre âge. Il est temps de mettre en place une forme de dépénalisation ou de tolérance.

Entre polémique sur «l’ensauvagement» du pays et grandes opérations de police, Gérald Darmanin impose ses thèmes en cette rentrée politique, endossant sans états d’âme le costume de premier flic de France. La ligne est claire, c’est la sanction qui prime, gage de réparation pour les victimes et de dissuasion pour les auteurs. Les débats sur le rôle et la place de l’institution policière en France, sa relation aux minorités, son rapport à la violence mais aussi ses missions et ses conditions de travail, sont remisés au placard. La généralisation de l’amende forfaitaire pour usage de stupéfiants, en vigueur depuis le 1er septembre, s’inscrit dans cette droite ligne, promettant de réprimer plus efficacement les consommateurs sans s’interroger sur le bien-fondé de cette politique et ses effets sur les relations entre la police et la population.

A LIRE AUSSI
Darmanin dégaine son serre-joints

En effet, plus qu’aucune autre, c’est bien la répression des drogues, et principalement du cannabis, qui mène aux dérives que l’on connaît. Elle explique les contrôles incessants à l’égard de certains segments de la population et la concentration des moyens et des effectifs policiers dans les quartiers où le trafic a lieu, ce trafic qui pourrit la vie des habitants et exacerbe la violence, mais n’existe que parce que l’Etat en a décidé ainsi, en en interdisant le commerce légal.

Cette répression nourrit la politique du chiffre et mène à un dévoiement de la mission des forces de l’ordre. Le collectif Police contre la prohibition l’exprime très bien : «C’est un délit qui est résolu dès qu’il est constaté, c’est du 100% de taux d’élucidation, et ça, c’est très précieux pour les chiffres de la délinquance. 56% de l’activité d’initiative des flics, c’est la répression de l’usage de drogues, faire vider les poches et mettre en garde à vue pour le quart de gramme de shit qu’on a au fond de la poche.»

Les chiffres, eux, sont éloquents. Entre 2014 et 2015, 56% des infractions revélées par l’action des forces de l’ordre, qui représentent la part proactive de l’activité policière, étaient liées aux stupéfiants, parmi lesquelles 85% concernaient un usage simple et 90% touchaient au cannabis. Ce sont ces infractions qui viennent engorger les tribunaux et nourrir la surpopulation carcérale, puisqu’elles concernent près de 20% des détenus (Observatoire international des prisons). A noter que dans les condamnations liées aux stupéfiants, le trafic occupe une part marginale, de l’ordre de 2% (Observatoire français des drogues et des toxicomanies).

La répression et le contrôle encouragés
En clair, une part démesurée de l’activité policière consiste à réprimer un comportement qui ne nuit pas à autrui et dont la consommation occasionnelle présente des risques limités pour la santé, en tout cas pas plus élevés que ceux émanant de la consommation des drogues légales que sont le tabac et l’alcool. Cette activité des forces de l’ordre génère en retour des effets secondaires désastreux, exacerbant notamment les tensions avec une partie de la jeunesse, pour un résultat non-existant en termes de santé publique.

La nouvelle amende forfaitaire de 200 euros ne réglera en rien ces problèmes, pire, elle risque de les aggraver. Elle pourrait alléger le volet judiciaire de la répression des drogues en mettant fin aux poursuites lors de son règlement, mais encore faut-il que l’amende soit systématiquement payée. Les premières expérimentations sont loin de l’avoir démontré. Du côté du travail des policiers, on peut par contre prévoir l’effet l’inverse. Cette mesure, qui permet de punir plus simplement les usagers, encouragera les contrôles et les sanctions. On peine à croire Gérald Darmanin quand il déclare qu’elle sera appliquée «dans les quartiers de Créteil comme dans le XVIe arrondissement de Paris», un secteur de la capitale où l’activité policière se fait pour le moins discrète. Ce sont bien les habitants des quartiers qui en seront la première cible.

A LIRE AUSSI
Amende pour usage de cannabis : «L’Etat met encore le sujet sous le tapis»

Pour faire cesser cette guerre absurde et son cortège de drames et de vexations, une solution existe, c’est celle de la légalisation du cannabis. Bien menée, elle apporterait de nombreux bénéfices pour les usagers, les policiers et la population dans son ensemble. Au-delà d’une meilleure politique de prévention et de nouveaux gains économiques et fiscaux, la légalisation mettrait aussi un terme à l’insupportable gâchis humain auquel mène la prohibition. Elle débarrasserait enfin les forces de l’ordre d’une activité répressive qui n’a que peu de choses à voir avec la protection de l’ordre public et de la population.

Une telle légalisation ne serait pas synonyme de «lâcheté intellectuelle», comme le pense Gérald Darmanin, mais nécessiterait au contraire de faire preuve d’un grand courage politique. Il faut espérer que la mission d’information parlementaire «Réglementation et impact des différents usages du cannabis», qui se tient en cette fin d’année 2020, débouche sur des propositions concrètes en ce sens et fasse évoluer un débat miné par les postures. Alors que la plupart de ses voisins ont déjà bougé, en mettant en place une forme ou une autre de dépénalisation ou de tolérance, la France ne peut plus se contenter d’une posture aussi rétrograde, qui a prouvé toute son inefficacité.

Vincent Delhomme directeur des études du think-tank GenerationLibre

Commentaires

Un autre bienfait du cannabis ! La politique du chiffre...

Les forces policières reçoivent leur part des bienfaits de la prohibition du cannabis et certains illégalement.
Plusieurs ont même reçu des promotions !
Enfumer la populace pour donner "l'impression de justice" !
Détourner l'attention des 100 000 morts annuelles pour le tabac et l'alcool divin !
Et ça fonctionne !

«C’est un délit qui est résolu dès qu’il est constaté !»
«85% concernaient un usage simple et 90% touchaient au cannabis.»
«A noter que dans les condamnations liées aux stupéfiants, le trafic occupe une part marginale, de l’ordre de 2%» (Observatoire français des drogues et des toxicomanies).

Nos amis du *CIRC et moi le répétons depuis des années qu'un délit est résolu dès qu’il est constaté !

Si on enlève le 85% d'usage simple il n'y aurait que 2% de délits résolus liés aux stupéfiants !
Moins dangereux de s'en prendre à un simple consommateur qu'à un trafiquant ou un poivrot !

«Quand vous voyez un flic dans la rue, c'est qu'y a pas de danger. S'il y avait du danger, le flic serait pas là.»
«Les gardiens de la paix, au lieu de la garder, ils feraient mieux de nous la foutre !»
(Coluche)

Donner une aide immédiate et gratuite à la minorité de personnes qui le demandent !
Qui ont des problèmes personnels !
Foutre la paix à la majorité qui ont choisi de consommer une herbe millénaire sans dose mortelle.

Pourquoi continuer une guerre perdue ?

«Il ne s'agit pas de savoir si la guerre est réelle ou non. La victoire n'est pas possible. Il ne s'agit pas de gagner la guerre mais de la prolonger indéfiniment. Une société hiérarchisée repose sur la pauvreté et l'ignorance. Leur version devient vérité historique. Et rien d'autre ne peut avoir existé. Le but de la guerre est de maintenir la société au bord de la famine. La guerre est menée par l'élite contre ses propres sujets.»

«La guerre, c’est la paix. La liberté, c’est l’esclavage. L’ignorance, c’est la force.»

«Le monde a été divisé en trois classes.
La classe supérieure, la classe moyenne, la classe inférieure. [...]
Les buts de ces trois groupes sont absolument inconciliables.
Le but du groupe supérieur est de rester en place.
Celui du groupe moyen, de changer de place avec le groupe supérieur.
Le but du groupe inférieur, quand il a un but[...] est d'abolir toute distinction et de créer une société dans laquelle tous les hommes seraient égaux.»
(George Orwell 1984)
1984 (Nineteen Eighty-Four) est le plus célèbre roman de George Orwell, publié en 1949.

A qui profite de prolonger la guerre au cannabis indéfiniment ?

*CIRC
J'ai déjà été membre du CIRC !
https://www.circ-lyon.fr/
C'est quoi ce CIRC?

Le Collectif d’Information et de Recherche Cannabique, CIRC, est une association loi de 1901, fondée le 21 octobre 1991 par l’écrivain Jean Pierre Galland, et qui a pour objet « la collecte et la diffusion à but préventif de toute information relative au cannabis ».

Extrait:
QUE RECLAME LE CIRC ?

L’abrogation de l’article L.3421-4 (ex L.630) du code de la santé publique.

Le retrait immédiat du cannabis et de ses dérivés du tableau des stupéfiants.

L’amnistie pour toutes les personnes victimes de ce classement inepte.

L’ouverture d’un débat sur les modalités de la sortie de la prohibition des drogues.

Pages

Ajouter un commentaire

Plain text

  • Aucune balise HTML autorisée.
  • Les adresses de pages web et de courriels sont transformées en liens automatiquement.
  • Les lignes et les paragraphes vont à la ligne automatiquement.