Fraises du Québec: ici aussi, il y a des pesticides

Les Fraises du Québec: ici aussi, il y a des pesticides

Cher consommateur-mangeur québécois, je sais que vous en avez marre qu’on vous dise sans arrêt quoi manger et son contraire.

Publié le 15 août à 6h24

Marie-Claude Lortie
La Presse

« Oui au poisson. Mais pas le sauvage mal pêché ! Et pas l’élevage industriel non plus ! »

« Le tofu ? Bravo. Mais les OGM ! »

Et je sais aussi que vous adorez vos fraises. Nos fraises. Nos belles fraises rouges remplies de toute la magie parfumée de l’été.

Nos fraises locales ! C’est super de manger local, on encourage nos agriculteurs, on ne pollue pas avec le transport. Des fruits, en plus. N’est-ce pas ça qu’on doit choisir à la place des desserts sucrés ?

Sauf que voilà.

Avez-vous envie de manger du cyprodinil ? Du fludioxonil ? Ou encore, peut-être que celui-là, vous le connaissez : du malathion ?

Vous avez deviné. Les fraises québécoises sont contaminées par toutes sortes de résidus de pesticides.

Et ce n’est pas moi qui le confirme, c’est le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ). Rassurez-vous, on ne dépasse pratiquement jamais les normes permises.

Mais il y en a sur nos fruits. Et avez-vous envie d’avoir de l’iprodione ou du carbendazime dans vos confitures, même un tout petit peu ?

Malheureusement, on n’est pas beaucoup mieux que les Californiens, ceux dont on regarde pourtant les fraises gigantesques en plein mois de janvier, dans nos épiceries, en se demandant sur quelle planète elles poussent et quelle marque de crème pour la peau elles utilisent pour traverser l’Amérique en si bonne forme.

***

Vous rappelez-vous au printemps dernier le rapport de l’Environmental Working Group, lobby américain écolo super efficace, qui disait que les fraises issues de l’agriculture traditionnelle américaine étaient au sommet de la liste des produits présentant le plus de résidus de pesticides ? (Suivies des épinards et du… kale !)

Je ne sais pas pourquoi, mais quand j’ai vu ça, je me suis dit qu’au Québec, on devait sûrement faire mieux. Je me disais : « On le sait bien, les États-Unis, les fermes industrielles, les pesticides, les grosses fraises d’hiver… »

Il me semblait évident qu’ici, c’était plus éco.

Sauf qu’en savourant de délicieuses fraises de l’île d’Orléans récemment, je me suis reposé la question, j’ai pris mon courage à deux mains et j’ai pris contact avec le MAPAQ.

Et là, on m’a donné une réponse pas super réjouissante.

Le Ministère, qui a un plan de surveillance annuel des résidus de pesticides dans les aliments, particulièrement pour les fruits et légumes frais vendus au Québec, a fait analyser 211 échantillons de fraises québécoises entre 2007 et 2016, provenant de l’autocueillette, dans les kiosques à la ferme, dans les marchés publics, à l’épicerie, dans les centres de distribution. (Notons que les tests ont été faits sur les fraises telles qu’elles sont vendues et qu’elles n’avaient donc pas été rincées.) Et il a retracé 111 fois du cyprodinil et 73 fois du fludioxonil – deux fongicides toxiques pour toutes sortes de poissons, invertébrés et algues dans les cours d’eau –, 56 fois du boscalide, un fongicide aux effets inquiétants chez les rats, dont on sait encore peu de chose et mis sur la sellette l’an dernier par un collectif d’éminents scientifiques français.

En tout, 33 types de pesticides ont été identifiés sur les échantillons québécois, tous avec des noms plus compliqués les uns que les autres. Difficile de s’y retrouver et de juger quand il faut commencer à s’inquiéter, même si, nous rassure le MAPAQ, seulement un de ces échantillons « avait des teneurs [en pesticides] supérieures aux normes canadiennes sans représenter un danger imminent pour la santé », ce qui est mieux que les fraises importées où, sur les 180 échantillons, 23 dépassaient les limites canadiennes.

Surtout que 4 de ces 23 échantillons de fraises importées hors normes contenaient un insecticide possiblement cancérogène, la bifenthrine.

Mais il y en avait aussi dans deux des échantillons québécois, de cette bifenthrine, même si c’étaient des échantillons où les pesticides ne dépassaient pas les normes.

Bref, tout ça n’est pas fort appétissant.

Et dans le texte d’information qu’il nous a fait parvenir, le Ministère a écrit en outre ceci : « Les fraises québécoises analysées, variétés d’été et d’automne confondues, sont statistiquement comparables aux produits d’importation en termes de présence de résidus de pesticides quantifiés. »

***

Pourquoi a-t-on besoin de tous ces produits ?

Récurrence dans les échantillons contenant plus de 5 différents résidus de pesticides

Cyprodinil-33
Fludioxonil-26
Fenhexamide-17
Quinoxyfène-17
Boscalide-16
Captane-16
Pyriméthanil-13
Pyraclostrobine-12
Tétraconazole-11
Trifloxystrobine-11
Acétamipride-10
Spiromésifène-10
Benomyl-8
Iprodione-8
Myclobutanil-8
Malathion-6
Endosulfan-5
Spinétorame-4
Bifenthrine-2
Cyperméthrine-2
Folpet-2
Metalaxy-l2
Thiaméthoxame-2
Azoxystrobine-1
Carbaryl-1
Clothianidine-1
Propiconazole-1
Graphique: Source: Ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec

À cause de moisissures causées par notre climat humide, à cause de deux insectes appelés punaise terne et drosophile à ailes tachetées, à cause des changements climatiques qui obligent constamment les producteurs à ajuster leurs méthodes, m’a expliqué au téléphone la directrice générale de l’Association des producteurs de fraises et de framboises du Québec (APFFQ), Jennifer Crawford.

« On les utilise uniquement quand on ne peut pas régler la problématique autrement. »

Les producteurs, assure-t-elle, respectent ce que Santé Canada dit. « C’est sécuritaire. » « On travaille fort. »

Plusieurs nouvelles techniques sans produits chimiques sont constamment à l’essai, avec des insectes prédateurs, notamment. « Mais ce n’est pas toujours super efficace. »

Actuellement, seulement 2 % des producteurs travaillent en utilisant les méthodes biologiques. « Mais ça avance. »

Fait-on mieux que les Californiens, les Mexicains ?

Difficile de répondre avec des données, dit-elle, parce qu’il y a un manque de transparence. « On ne sait pas tout », répond la directrice, qui trouve bien intrigant que des fruits voyagent d’aussi loin pour se rendre ici tout en restant si intacts.

Mais chose certaine, ajoute-t-elle, les producteurs d’ici n’aiment pas mettre des pesticides.

« Ils veulent trouver des façons de réduire. Mais ça ne se fera pas du jour au lendemain. »

Et leur utilisation varie d’une année à l’autre, selon la météo et l’ampleur des problèmes.

Et savez-vous quoi ? Cette année, il a fait beau, il a fait chaud, il n’y a pas eu trop de pluie. « En général, assure Mme Crawford, cette année est une bonne année. »

Moi je vais choisir quand même les bios...

Commentaires

Cancérigène possible, probable ou avéré, quelles différences?

Les policiers et policières, les prohibitionnistes, chercheurs d'études d'opinions
ne donnent jamais les résidus de pesticides retrouvés dans les cannabis illégaux.

https://www.science-environnement.com/sante-environnement/qu-est-ce-qu-u...

Santé Environnement
Cancérigène possible, probable ou avéré, quelles différences?
26 septembre 2017

Ce site d’information a pour objectif de faire un état des lieux, objectif et impartial, des connaissances actuelles concernant l’impact de l’environnement sur la santé

4 notions à garder en tête

1. Tout ce qui est «naturel» et/ou «Bio» n’est pas sans danger.

2. La science n’est pas un dogme, les connaissances évoluent sans cesse: ce qui était vrai hier peut être erroné aujourd’hui…

3. Pour connaitre les effets réels à long terme, d'un polluant ou d'une source de pollution (toxicité chronique), plusieurs dizaines d'années d'exposition sont nécessaires.

4. Ainsi tout n’est pas blanc ou noir, c’est une question de balance : les bénéfices sont-ils supérieurs aux risques?

Cancérigène possible, probable ou avéré, quelles différences?
26 septembre 2017
Cancérigène ou cancérogène?
Les deux sont corrects, mais qualifier un produit de “cancérigène” est imprécis. Est-il cancérigène avéré, probable ou possible?

Deux classifications différentes
Les composés ou les mélanges cancérigènes peuvent répondre, soit à la classification du CIRC – Centre International de Recherche sur le Cancer, soit à celle de l’Echa – Agence européenne des produits chimiques. Cette dernière possède une base plus restreinte, mais elle s’intéresse également aux composés mutagènes (peut modifier l’ADN ou les composants cellulaires) et reprotoxiques (toxique pour la reproduction, c’est à dire, peut nuire à la fertilité ou au fœtus). D’un point de vue légal, en France, c’est la classification de l’Agence européenne des produits chimiques (Echa) qui fait foi.

Pour être encore plus précis, on devrait d’ailleurs parler d’agents CMR (Cancérigènes, Mutagènes, Reprotoxiques), car le nom “composé” renvoie souvent à un produit chimique, alors que des agents biologiques (ex: certaines souches du papillomavirus humain) et physiques (ex: rayons X et les UV) peuvent également être CMR.

La classification de l’Union Européenne différencie 3 paliers:

► Catégorie 1A : le composé ou le mélange est Cancérigène, Mutagène ou Reprotoxique (CMR) avéré

► Catégorie 1B : fortes présomptions d’être Cancérigène, Mutagène ou Reprotoxique

► Catégorie 2 : le composé ou le mélange est préoccupant en raison d’effets possibles mais pour lesquels il manque des données probantes

La classification du Centre International de Recherche sur le Cancer a 5 niveaux:

► Groupe 1 : le composé ou le mélange est cancérigène avéré

► Groupe 2 A: probablement cancérigène

► Groupe 2B : peut-être cancérigène (ou cancérigène possible)

► Groupe 3 : le composé ou le mélange est inclassable

► Groupe 4 : le composé ou le mélange est probablement non cancérogène

Un même agent, peut-il être classé différemment selon l’Echa et le CIRC?

Absolument.

Exemple avec le formaldéhyde (n°cas 50-00-0), classé par l’Echa dans la catégorie 1B (probable), alors que le CIRC l’a classé dans le groupe 1 (avéré).

De même un agent peut être présent dans l’une et absente de l’autre. C’est le cas par exemple du glyphosate (n°cas 1071-83-6), classé dans le groupe 2A (probable) par le CIRC mais absent de la classification de l’Echa.

Concrètement, qu’est-ce que ça signifie possible, probable, avéré?

“Avéré” signifie que le lien de causalité entre l’agent et le développement d’un cancer, d’une atteinte génétique ou d’un effet sur la reproduction, est clairement établi. On est sûr, il n’y a plus de doute. Ex: la fumée de tabac, l’amiante, les PCBs, la viande transformée (type charcuterie), les UV, les rayons gamma et les rayon X…

“Probable” signifie que les preuves sont limitées chez l’homme, mais suffisantes chez l’animal. Autrement dit, sur les espèces animales, en laboratoire, on est capable de mettre en évidence les effets délétères mais pas sur l’humain. Bien que ces informations soient précieuses, il n’en reste que l’être humain n’est pas une souris, que la barrière inter-espèce est importante et que les conditions de laboratoire ne sont pas représentatives des conditions réelles d’exposition. Quelques exemples: la combustion de biomasse, le glyphosate, la consommation de viande rouge…

“Possible” indique que les informations sont limitées chez l’homme et insuffisantes chez l’animal. Il peut s’apparenter au principe de précaution. Le cholestérol et les champs électromagnétiques sont dans cette catégorie.

Autorisation et interdiction des substances CMR

La classification du CIRC n’a aucune valeur réglementaire dans l’Union Européenne, même si elle est utilisée comme référence. Toutes les substances classées CMR catégorie 1 et 2 par l’Echa sont, en principe, interdites de commercialisation. En principe, car des dérogations existent, si l’agent est indispensable à un procédé et ne peut être substitué par exemple. De plus, même si un agent est interdit, on peut toujours le trouver à l’état de trace, car il est impossible de garantir la pureté d’un produit, de garantir le 0% absolu. Dans ce cas de figure, depuis le 1er janvier 2010, le benzène, le trichloroéthylène, DEHP (Phtalate de bis (2-éthylhexyle)) ou DBP (Phtalate de dibutyle) sont interdits dans les produits de construction et décoration. En réalité, ils peuvent être présents s’ils émettent moins de 1 µg/m³.

Comment reconnaître un produit cancérigène?

Pour les produits chimiques (d’entretien, de bricolage…), la nouvelle réglementation

d’étiquetage impose des pictogrammes de danger.

https://www.science-environnement.com/sante-environnement/les-9-nouveaux...

Ce pictogramme indique que le produit est soit CMR, soit qu’il peut altérer le fonctionnement de certains organes, provoquer des difficultés respiratoires ou être mortel en cas d’ingestion et de pénétration dans les voies respiratoires.

Pour les autres secteurs, tant que les valeurs détectées respectent les normes en vigueur, ils restent autorisés.

Quel(s) danger(s) face à un agent CMR?

Face à un agent CMR, c’est la fréquence d’exposition (la répétition), le temps d’exposition (durée) et le moment de l’exposition (fenêtre d’exposition) qui constituent le danger, peu importe la dose. Le paradigme “c’est la dose qui fait le poison” a été annihilé avec les agents CMR. D’ailleurs les effets sanitaires ont souvent été mis en évidence par l’intermédiaire des travailleurs, exposés 8h/j pendant plusieurs années consécutives.

L’appréhension du risque est également très subjective.

Adopteriez-vous la même conduite d’éviction
face à un produit classé cancérigène probable ou possible que s’il était avéré?

Le meilleur exemple reste le tabac.
Ses effets sanitaires sont parfaitement connus : cancer du poumon, cancer de la gorge, BPCO… et pourtant le nombre de fumeurs peine à diminuer (selon les attentes des autorités de santé).

Alcool et risques de cancer
L'alcool est un cancérogène avéré pour l'homme (groupe 1 du CIRC ). Les cancers dont le lien avec la consommation d'alcool est avéré sont les cancers des voies aérodigestives supérieures (VADS) , de l'œsophage, du foie, du sein chez la femme, et le cancer colorectal.23 avr. 2019

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Rappelons que:

Au Québec, les agronomes qui conseillent les agriculteurs sur l'utilisation des pesticides sont majoritairement des salariés des entreprises qui vendent ces produits. La plupart reçoivent même des primes, bonis ou commissions, ce qui est illégal, selon le code de déontologie de l'Ordre des agronomes.

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