L'usager de drogues: forcément: il est injecteur, il est précarisé, il est dangereux et automatiquement coupable

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Usagers de drogue et réduction des risques : retrouvons la parole politique forte

Publication: 24/06/2014 14h39 CEST Mis à jour: 24/06/2014 14h42 CEST

Aucune substance n'enlève à l'homme son humanité, aucune substance n'enlève à l'homme sa citoyenneté. C'est évident. Ca devrait l'être en tout cas mais cela ne l'est pas.

L'usager de drogues est devenu une figure à part entière: forcément il est injecteur, forcément il est précarisé, forcément il est dangereux et automatiquement coupable. Voilà comment une personne usagère de drogues voit son identité réduite à ça : l'usage.

La réalité est toute autre : un usager de drogues, c'est une mère de famille, un fils, un commerçant, un sportif, un employé, une voisine, une personne agréable ou antipathique, bavarde ou taiseuse, cela peut-être aussi une personne qui ne se reconnaît pas comme usagère.

C'est en prenant en compte, en intégrant cette réalité, en changeant le regard du plus grand nombre que la politique de réduction des risques (RdR) en direction des usagers pourra avancer, se développer au regard des besoins et être acceptée et comprise par le grand public.

Alors, certes cette politique de réduction des risques a été très légitimement légalisée il y a déjà quelques années, mais la légalisation n'emporte pas forcément l'adhésion et les récents débats sur la question de l'expérimentation des salles de consommation à moindre risque ont mis en exergue des clivages.

Concrètement, si nous analysons la politique de réduction des risques sous le seul prisme de son impact sanitaire, c'est simple : elle est une des politiques de santé publiques les plus efficaces qu'il soit !

Cette politique n'a plus rien à prouver de sa pertinence et son efficience. Il en va de même sur un des aspects de la RdR : les salles de consommation à moindre risque. Le fait d'avoir réussi à imposer ce thème dans la sphère publique était loin d'être évident tant le sujet est complexe et les préjugés importants. Les associations ont réussi à en faire un sujet de discussion donc un sujet de positionnement et ce n'est pas la moindre des victoires !

Sur ces salles tout a été dit, tout est prouvé, tout le monde, s'il est mu par une vraie objectivité et non par un idéologisme marketing et électoraliste, reconnait l'utilité de ce type de structure, aussi bien sur le plan individuel que sur le plan collectif notamment au regard de la sécurité publique. La littérature est nombreuse sur ce type de structure et l'érige, non comme une solution miracle mais comme un outil supplémentaire dans le panel déjà existant.

Même si l'expérimentation de ce type de structure a été et est au cœur des débats, elle ne constitue pas une fin en soi.

Au-delà de ces salles, les associations travaillent depuis longtemps déjà sur l'extension du champ d'application des dispositifs de RdR, notamment dans le monde carcéral et sur la création de nouveaux outils adaptés aux usages et aux substances consommées, par exemple la prescription d'héroïne sous contrôle médicalisé. C'est sur ce terrain que les associations attendent le politique : pour donner l'impulsion nécessaire à aller dans le bon sens, celui d'une innovation concrète en matière de RdR.

Les associations ont toujours su aiguillonner le politique, l'accompagner, le convaincre. Jamais satisfaits les associations de réduction des risques ? Non, elles sont simplement motivées par l'urgence du terrain, ce qui les oblige à être dans un état de "qui-vive" permanent. Certes, le secteur s'est professionnalité depuis la création des CAARUD, pour autant a-t-il perdu son âme ? Assurément pas.

A-t-elle perdu sa capacité de révolte et de transformation sociale ? Non plus.

Le politique a besoin des associations tout comme l'inverse est également vrai. Dans ce combat pour la santé, l'égalité et la dignité, c'est le courage politique qui doit primer. Attention, ce courage, ce n'est pas celui qui consiste à dénoncer à corps et à cris en essayant de hurler assez fort pour faire oublier que l'on ne fait rien, ni celui qui consiste à déclarer la guerre aux usagers et à taxer de laxiste tous ceux qui oseraient prôner une autre solution.

Tellement plus simple de se draper dans si ce confortable manteau du moralisme de bas étage. ... Le vrai courage politique, c'est d'ouvrir les yeux, de les ouvrir en grand, de travailler ensemble et d'agir, d'agir sans forcément que ça plaise mais parce que l'on sait que l'on vise l'intérêt général.

Alors au-delà des salles de consommation à moindre risque, sachons retrouver une parole politique forte sur le sujet pour faire avancer cette politique de réduction des risques, une politique sanitaire tout autant que citoyenne. Une politique qui sauve des vies et qui change notre société.

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