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Le cannabis soulage les douleurs d'origine neurologique
Mardi 31 août 2010

L'utilisation médicale du cannabis a fait l'objet de nombreuses études scientifiques, en particulier pour son effet antalgique. Afin d'évaluer son efficacité sur les douleurs d'origine neurologique, en général intenses et rebelles aux anti-douleurs habituels, des chercheurs canadiens ont fait tester à 21 patients de la marijuana inhalée à différentes doses.

Des douleurs difficilement supportables
Les douleurs neuropathiques, qui concerneraient entre 1,5 et 3 millions de Français, sont liées à des atteintes des nerfs, de la moelle épinière ou du cerveau, suite à une maladie (diabète, sida, zona, sclérose en plaques...), un traumatisme (section nerveuse) ou une intervention chirurgicale (hernie discale, amputation, etc.). Les nerfs endommagés envoient des signaux erronés au cerveau, qui envoie en réponse des signaux douloureux.

Ces douleurs se caractérisent par un fond douloureux permanent avec parfois des sensations de coups de poignard, des brûlures ou de chocs électriques. Elles sont très handicapantes, empêchent souvent de dormir et altèrent profondément la qualité de vie. De plus, elles résistent aux antalgiques usuels et sont donc difficiles à traiter. Les médecins peuvent cependant recourir à des antidépresseurs, neuroleptiques voire anesthésiants, mais ces médicaments ont de nombreux effets secondaires, en particulier lorsqu'ils sont utilisés au long cours. D'autres techniques, comme la stimulation électrique locale, sont également testées.

Du cannabis en capsules à différents dosages, dont un placebo
Le cannabis étant fréquemment utilisé pour lutter contre les douleurs chroniques, des chercheurs de l'université Mc Gill de Montréal ont décidé de le tester de manière rigoureuse, comme un médicament lambda, chez 21 patients présentant de telles douleurs depuis au moins 3 mois et n'ayant pas consommé de cannabis depuis au moins 1 an. Ils ont utilisé des capsules de 25 mg de marijuana américaine, fournie à différents dosages de THC (TétraHydroCannabinol, la substance active du cannabis) : 2,5 %, 6 % et 9,4 %. La nouveauté de cette étude réside en l'élaboration d'un placebo, avec des capsules contenant du cannabis inactivé (0 % de THC). Les participants ne pouvaient pas identifier le dosage du cannabis et ont inhalé d'un coup le contenu de la capsule, par le biais d'une pipe en titane.

Une diminution de l'intensité de la douleur
Les participants ont inhalé (en retenant 10 secondes leur respiration) une capsule trois fois par jour pendant 5 jours. Leur douleur et qualité de vie ont été évaluées quotidiennement, sur plusieurs périodes de 5 jours. Les résultats montrent que les utilisateurs des capsules dosées à 9,4 % avaient rapidement et significativement moins mal que ceux qui avaient reçu du placebo (0 %). Les dosages intermédiaires entraînent également une amélioration, mais moins nette, non significative statistiquement.

Une diminution des troubles du sommeil
L'usage de cannabis à 9,4 % a également permis une nette amélioration du sommeil de ces patients douloureux : endormissement plus facile, plus rapide, meilleure qualité globale du sommeil. Par contre, l'humeur et la qualité de vie ont été inchangées. Les effets secondaires les plus fréquents, qualifiés par les auteurs de "mineurs", ont été des maux de tête, une sécheresse oculaire, des sensations de brûlures dans les zones douloureuses, des vertiges, un engourdissement et de la toux.

Vers une amélioration des protocoles d'études sur le cannabis ?
Les auteurs concluent à une efficacité et une bonne tolérance du cannabis inhalé sur ce type de douleurs rebelles, soulignant la rigueur de leur protocole, la bonne observance et le suivi étroit des patients. Ces résultats rejoignent ceux de nombreux travaux observationnels antérieurs. Ils pensent également avoir démontré la faisabilité d'études rigoureuses sur le cannabis versus placebo, ce qui permettrait de mettre au point des protocoles avec d'autres dosages, d'autres durées d'utilisation, et une inhalation par vaporisateur plutôt que par combustion (cannabis fumé). Avec un vaporisateur, le cannabis est chauffé sans être brûlé, ce qui dégage de la vapeur et donc le principe actif sans y associer des goudrons cancérigènes.

De telles études complémentaires (sur différentes douleurs, mais aussi les nausées, les pertes d'appétit, ou encore le glaucome), si elles voient le jour, pourraient permettre de déterminer précisément les doses thérapeutiques efficaces et la tolérance du produit.
Aujourd'hui l'usage thérapeutique du cannabis est seulement autorisé dans certains pays (Canada, Allemagne, Pays-Bas, Espagne, Israël, 13 Etats des Etats-Unis, etc.), malgré une utilité probable dans de nombreuses indications. L'Académie française de médecine avait par exemple pris position contre l'usage de cannabis à des fins médicales en France en mars 2010, s'appuyant notamment sur la difficulté d'obtention d'une dose thérapeutique précise, écueil surmonté par cette étude canadienne. Cela permettra-t-il de lever les réticences à l'usage médical du chanvre en France ?

Jean-Philippe Rivière

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INTOX !

http://www.academie-medecine.fr/detailPublication.cfm?idRub=27&idLigne=1792

Rapports et communiqués
Communiqué adopté le 23 février 2010
Le cannabis : médicament ou drogue ?

COMMUNIQUÉ au nom de la Commission VI (Addictions)

Cannabis : un faux médicament, une vraie drogue
Jean COSTENTIN*

Un article de la revue « Courrier international » (n°988-oct.2009), reproduisant un article du journal « Fortune » révèle l’effondrement des digues édifiées contre la diffusion du cannabis par le pouvoir fédéral américain, sous la pression de lois élaborées par certains états en faveur de l’utilisation thérapeutique de cette drogue. L’application de ces lois présentant le cannabis comme un médicament risque d’en accentuer la pénétration dans la société américaine avec tous les effets délétères qu’on lui connaît. Le même type d’arguments refaisant périodiquement son apparition dans notre pays, l’Académie nationale de médecine renouvelle en les complétant les réserves émises à ce propos à deux reprises, en 1998 et 2006, et en indique les raisons :

Pour chacune des activités thérapeutiques alléguées, parfois démontrées, la pharmacopée n’est pas dépourvue de médicaments ayant satisfait aux nombreux et rigoureux critères qui permettent d’accéder à ce statut, développant des propriétés pharmacologiques supérieures à celles du tétrahydrocannabinol (THC).

Pour tout médicament, la dose thérapeutique utile doit être connue avec précision. Or, la marijuana (plante du chanvre indien) et le haschich (sa résine) sont des mélanges de nombreuses substances, dont les proportions absolues et relatives peuvent changer considérablement selon la variété, le lieu de culture, le climat, le moment de la récolte. Dans le cas de cannabis fumé, les concentrations en principe actif, THC, sont très variables.

Mais surtout, ce qui qualifie un médicament est son rapport bénéfice/risque établi par l’analyse des bienfaits que pourra en retirer le patient, comparés aux risques d’effets secondaires et de toxicité. S’agissant du cannabis /THC, les effets pharmacologiques sont d’une intensité modeste alors que les effets secondaires sont nombreux et très souvent adverses.

Les principaux méfaits psychiques consistent en perturbation de la mémoire, de l’éveil, de l’attention ; développement au long cours de troubles anxieux, de dépression, de décompensation ou d’aggravation de la schizophrénie ; incitation à la consommation d’autres drogues. Par ailleurs, le cannabis accroît les risques d’accidents de la route et du travail et potentialise les effets de l’alcool. Ses principaux méfaits physiques résident dans une dépression de l’immunité, la survenue de cancers broncho-pulmonaires et de la sphère ORL, d’infarctus du myocarde, d’artérites, de pancréatites. En outre, fumer du cannabis au cours de la grossesse est dangereux pour le fœtus.

Pour toutes ces raisons, issues de données épidémiologiques documentées, l’Académie nationale de médecine met en garde contre l’utilisation du cannabis en tant que médicament.

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L’Académie, saisie dans sa séance du mardi 23 février 2010, a adopté le texte de ce communiqué moins deux abstentions.

Pour copie certifiée conforme,
Le Secrétaire perpétuel,

Professeur Jacques-Louis BINET

19/03/2010

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