Un remède nommé cannabis
http://www.letemps.ch/Page/Uuid/fb6dd63c-a32c-11df-a37f-7368e3f61aa2/Un_...
STUPéFIANTS dimanche8 août 2010
Un remède nommé cannabis
Sylvie Arsever
Avec l’entrée en vigueur de la nouvelle loi sur les stupéfiants l’an prochain, l’usage médical du cannabis deviendra possible. Selon quelles modalités? C’est tout l’enjeu des ordonnances d’application, actuellement à l’étude à l’Office fédéral de la santé publique
«Je suis polytraumatisé et j’ai des douleurs chroniques. Lorsque j’ai quitté l’hôpital après mon accident, on m’a donné de la morphine pendant cinq mois et j’ai plongé dans la dépression. Après, on m’a mis sous Ponstan; au bout de deux ans, j’ai développé un ulcère. Aujourd’hui, ça fait cinq ans que je me soigne avec du cannabis et ça va bien.»
Antoine* vit en zone grise: l’association Alternative Verte, dont il est l’un des animateurs, réunit à Genève quelque 70 personnes qui utilisent du chanvre pour lutter contre divers symptômes: douleurs, crampes, nausées, angoisses… Elle distribue à ses membres des plantons et des conseils pour les faire prospérer et les transformer en préparations: beurre, gâteaux, etc. Lui-même fume son chanvre mais estime que c’est une pratique qu’il ne peut recommander à personne. http://www.alternative-verte.info/
Beaucoup de ces usagers agissent avec l’accord plus ou moins enthousiaste de leur médecin traitant, auquel ils demandent un «certificat» attestant du fait qu’ils utilisent le chanvre pour combattre un symptôme rebelle. Dénué de valeur légale, ce document a toutefois permis à quelques membres d’échapper en tout ou en partie aux foudres de la loi, assure Antoine. Ce que Patrick Puhl, porte-parole de la police genevoise, ne confirme pas: «Nous n’avons jamais vu de tels certificats», assure-t-il. Zone grise…
La situation pourrait se clarifier prochainement. La nouvelle loi fédérale sur les stupéfiants, qui devrait entrer en vigueur l’an prochain, entrouvre la porte à une utilisation médicale du cannabis. Les ordonnances d’application devraient être mises en circulation cet automne. Elles détermineront lesquels des usagers de cannabis médical auront la chance de se retrouver du bon côté de la loi et lesquels resteront dans une semi-clandestinité.
Le projet, élaboré par un groupe d’experts, prévoit, selon Mona Neidhart, porte-parole de l’Office fédéral de la santé publique (OFSP), la possibilité de faire homologuer des traitements à base de cannabis, synthétique ou naturel, auprès de Swissmedic. Ce qui implique, pour les demandeurs, de démontrer que le médicament proposé est efficace et qu’il apporte une plus-value par rapport aux traitements existants.
Certaines pratiques ont à première vue plus de chances de réussir ce test que d’autres. L’usage de THC (tétrahydrocannabinol, le principal principe actif du cannabis) est déjà possible aujourd’hui, sur autorisation spéciale, dans le traitement des nausées liées aux chimiothérapies du cancer, de la perte d’appétit qui accompagne, notamment, le sida et des crampes douloureuses que subissent les personnes souffrant de sclérose en plaques ou d’atteintes de la moelle épinière. Actuellement, une septantaine d’autorisations sont en cours, un chiffre qui n’a guère varié ces dernières années.
«Pour tous ces patients, le traitement au THC n’est envisagé qu’en dernier recours, lorsque d’autres médications ne marchent pas ou ne suffisent pas à supprimer le symptôme, relève Barbara Broers, médecin adjoint au service de premier recours des Hôpitaux universitaires genevois. Beaucoup n’en ont absolument pas besoin, mais pour certains, il apporte une aide précieuse.»
Précieuse mais chère: la seule préparation disponible en Suisse, le Dronabinol, est vendue en flacon à 200 francs qui dure entre une et quatre semaines. Non remboursé par l’assurance de base. De nombreux usagers sont donc tentés de se tourner vers la plante – d’autant plus, estime Barbara Broers, que cette dernière présente sans doute des avantages thérapeutiques.
«Le THC n’est qu’un des principes actifs du chanvre qui contient une soixantaine de cannabinoïdes au moins. Et plusieurs travaux donnent à penser que les autres ont aussi une utilité. Le cannabidiol, par exemple, semble contrecarrer l’effet psychotrope du THC. Pour de nombreux patients, qui sont incommodés par cet effet, c’est un atout.»
Claude Vaney, médecin responsable du secteur de réadaptation et de neurologie à la Clinique Bernoise Montana, a mené l’une des études qui ont permis de mettre en évidence l’effet du cannabis, administré dans ce cas par capsule contenant de l’herbe broyée, dans le traitement des symptômes de la sclérose en plaques, particulièrement les crampes douloureuses qui sont parmi les plus lourds.
«Le chanvre a un effet de relaxation musculaire et il diminue la perception de la douleur. Son action psychotrope contribue sans doute à produire le sentiment de bien-être que notent les patients. Mais ce n’est pas cet effet qui est recherché: au contraire, il peut être gênant – à partir d’une certaine dose, les gens se sentent affaiblis, ont de la peine à se concentrer. Pour cette raison, la plupart prennent plutôt du cannabis le soir.»
(Zappiste: l'avantage du cannabis fumé, sur l'herbe broyée ingérée, c'est la rapidité d'action, un effet immédiat.)
Si certains bénéficient de prescriptions de Dronabinol, la plupart préfèrent recourir à la plante, malgré des difficultés croissantes depuis qu’a cessé de souffler le vent de libéralisme des années 1990. Claude Vaney les estime à une centaine et inscrit leur choix dans une tendance plus générale: «Comme beaucoup de patients atteints de maladies chroniques, les gens qui souffrent de sclérose en plaques ont tendance à se tourner vers des médecines alternatives, qui souvent leur apportent un soulagement réel. Cela va dans le sens, que nous encourageons, d’une prise en charge de la maladie par le patient lui-même, avec notre collaboration.»
C’est l’un des premiers enjeux de la réforme en cours. Elle devrait, estime Claude Vaney, permettre l’usage aussi bien du chanvre naturel que du THC synthétique. C’est également, assure-t-il, le point de vue du groupe d’experts, dont il fait partie. «Il faut que les gens puissent aller dans une pharmacie avec une ordonnance et obtenir du cannabis élaboré dans des conditions médicales acceptables. Les Néerlandais y arrivent, on devrait y arriver aussi.» (Voir l’encadré ci-dessous.)
Le second enjeu est plus délicat. Si les patients du docteur Vaney ont de bonnes chances d’avoir accès au cannabis médical, ce n’est pas le cas de nombreuses personnes qui trouvent dans la consommation de cannabis un soulagement compréhensible au regard de certaines hypothèses formulées par les chercheurs, mais résolument extérieur aux indications admises. Antoine en fait sans doute partie.
Barbara Broers en voit d’autres dans sa consultation: «Certaines personnes atteintes de dépression parviennent à un meilleur équilibre avec du cannabis qu’avec un traitement psychotrope conventionnel. On voit aussi des patients qui ont un long passé de toxicomanie et d’alcoolisme et ont réussi à tout arrêter. Sauf le chanvre, qu’ils consomment à des doses qui n’altèrent pas leur perception et qui leur permet de trouver un équilibre.»
Ni elle ni aucun médecin à ce stade ne recommanderait ce type de traitement. Au contraire, les liens, apparemment complexes, entre schizophrénie et cannabis suscitent une méfiance croissante. Mais dans la mesure où ils constatent qu’un patient y trouve un bénéfice réel, certains seraient disposés à l’accompagner.
Pour le moment, la loi fait écran. Cela risque bien d’être encore le cas demain. Avec, peut-être, quelques dérogations: le projet des experts prévoit également, selon l’OFSP, des autorisations exceptionnelles délivrées au cas par cas à titre compassionnel. Dans ce domaine comme dans celui des indications et de la diversité des préparations accessibles, beaucoup dépendra du débat politique à venir.
*?Prénom fictif.
------------------------------
http://www.letemps.ch/Page/Uuid/fabeb580-a32c-11df-a37f-7368e3f61aa2/Tou...érir_un_jour
stupéfiants lundi9 août 2010
Tout ce que le chanvre pourrait guérir un jour
Sylvie Arsever
La découverte d’un système cannabinoïde endogène a relancé la recherche des usages thérapeutiques du cannabis. Et les pistes sont nombreuses…
Le cannabis ne cesse de dérouter les chercheurs. Après en avoir longtemps exclu l’existence, ils ont découvert à partir de 1990 l’existence de récepteurs spécifiques sur lesquels se fixent ses principes actifs et de cannabinoïdes endogènes ou endocannabinoïdes qui s’y lient. L’exploration de ce système endocannabinoïde, dont tout donne à penser qu’on n’en connaît encore qu’une partie, a apporté un élan décisif à la recherche sur les usages thérapeutiques du chanvre, dont certains remontent loin dans l’histoire des pharmacopées traditionnelles.
La douleur
Les endocannabinoïdes semblent jouer le rôle de modulateurs fins de la libération des neurotransmetteurs. Ils sont notamment impliqués dans la perception de la douleur, ce qui pourrait expliquer un usage ancien du chanvre comme antidouleur. Les études cliniques, toutefois, nuancent: peu efficace contre les douleurs aiguës, le cannabis donne des résultats plus intéressants sur les douleurs d’origine neurologique – sclérose en plaques et neuropathies notamment. Sans être spectaculaires, ces résultats sont dignes d’intérêt car ces douleurs sont souvent rebelles aux autres traitements.
La sclérose en plaques
La douleur mise à part, d’autres symptômes liés à cette maladie semblent pouvoir être contrôlés à l’aide de cannabis: spasmes musculaires, irritation de l’intestin et des voies urinaires, notamment. Plusieurs études récentes ont porté sur ce sujet. Là encore, les résultats sont encourageants, mais en bonne partie par défaut: les médicaments reconnus n’ont souvent qu’une efficacité partielle.
L’hypothèse a également été émise que le cannabis pouvait avoir un effet neuroprotecteur susceptible de freiner l’évolution de la maladie. A ce stade, elle n’est pas confirmée mais une étude est en cours.
Les nausées et les pertes d’appétit
Un endocannabinoïde identifié stimule l’appétit – il est notamment présent dans le lait maternel et son inhibition chez la souris stoppe la tétée. Cet effet du cannabis est le plus généralement reconnu. Le Marinol est autorisé aux Etats-Unis depuis la fin des années 1980 pour lutter contre les nausées dues aux chimiothérapies et les pertes d’appétit des personnes atteintes du sida.
Le glaucome
Le cannabis diminue la pression intra-oculaire et pourrait donc être utile dans la prévention du glaucome. Il pourrait être possible, en agissant directement sur les récepteurs du système endocannabinoïde, d’obtenir le même résultat en évitant l’effet psychotrope.
La schizophrénie
Susceptible de déclencher des psychoses, voire, selon certains, d’en causer, le cannabis pourrait aussi jouer un rôle curatif. Pratiquement, certains patients schizophrènes en tirent un avantage qui pourrait être expliqué par une action antipsychotique du cannabidiol.
Le cancer
L’activation des récepteurs cannabinoïdes semble favoriser la mort des cellules dans une catégorie de tumeurs du cerveau, les gliomes. Pour le moment, cet effet prometteur semble limité à ce type de cancer bien précis.
----------------------------
http://www.cannabis-med.org/index.php?tpl=cannabinoids&id=243&lng=en&red...
Une étude récente sur les usages médicaux du cannabis (en anglais)
Cannabinoids 2010;5(special issue):1-21 (February 13, 2010)
Review
Review on clinical studies with cannabis and cannabinoids 2005-2009
Arno Hazekamp, Franjo Grotenhermen
Institute Biology Leiden, Leiden University, The Netherlands, ahazekamp@rocketmail.com
To date, a large number of controlled clinical trials have been done evaluating the therapeutic applications of cannabis and cannabis-based preparations. In 2006, an excellent review was published, discussing the clinical trials performed in the period 1975 to June 2005 [Ben Amar 2006]. The current review reports on the more recent clinical data available. A systematic search was performed in the scientific database of PubMed, focused on clinical studies that were randomized, (double) blinded, and placebo-controlled. The period screened was from July 1, 2005 up to August 1, 2009.
The key words used were: cannabis, marijuana, marihuana, hashish, cannabinoid(s), tetrahydrocannabinol, THC, CBD, dronabinol, Marinol, nabilone, Cannador and Sativex. For the final selection, only properly controlled clinical trials were retained. Open-label studies were excluded, except if they were a direct continuation of a study discussed here.
Thirty-seven controlled studies evaluating the therapeutic effects of cannabinoids were identified.
For each clinical trial, the country where the project was held, the number of patients assessed, the type of study and comparisons done, the products and the dosages used, their efficacy and their adverse effects are described. Based on the clinical results, cannabinoids present an interesting therapeutic potential mainly as analgesics in chronic neuropathic pain, appetite stimulants in debilitating diseases (cancer and AIDS), as well as in the treatment of multiple sclerosis.
Keywords
cannabinoids, cannabis, therapeutic potential, controlled clinical trial, efficacy, safety
[ PDF of the full text ]
Recent comments